Maître Sophie Risaletto

La loi n°2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi ALUR, a instauré d’importants changements dans les rapports entre bailleur et locataire.

Les modifications prévues par ce texte sont applicables depuis le 27 mars 2014 aux baux d’habitation conclus après cette date. Les contrats de location en cours à la date d’entrée en vigueur de la loi demeuraient soumis aux dispositions qui leur étaient applicables.

La Cour de Cassation par un avis du 16 février 2015 a néanmoins décidé que le nouveau délai de trois ans qui peut être accordé au preneur par le juge d’instance pour le paiement de la dette locative s’appliquait aux baux conclus antérieurement à la date du 27 mars 2014 bien que cette disposition ne soit pas expressément prévue par la loi ALUR.

L’avis de la Cour de Cassation du 16 février 2015 impose l’application immédiate de l’allongement à trois ans du délai de paiement de l’arriéré locatif offert au preneur à bail d’habitation.

La Cour justifie sa position, d’une part, par l’esprit de la loi ALUR qui est destinée à améliorer la prévention des expulsions et à traiter les impayés le plus en amont possible, et d’autre part par le fait que ce délai ne constitue pas un dispositif soumis à la liberté contractuelle des parties mais est un pouvoir accordé au juge par la loi.

Il convient en effet de noter que ce délai de paiement peut être accordé même d’office par le juge afin de permettre au locataire d’apurer sa dette locative.

La conséquence de l’application immédiate de cette disposition de la loi ALUR est de paralyser pendant trois ans les effets de la clause résolutoire inscrite dans le contrat de bail qui permettait au bailleur de solliciter auprès du juge la fin de la location et l’expulsion du locataire.

En revanche, si le preneur ne procède pas au paiement de l’arriéré locatif dans le délai et selon les modalités fixés par le juge, la clause résolutoire du bail reprendra son plein effet.

En outre, jusqu’au 27 mars 2017 l’arriéré de loyers ou de charges constitué avant le 27 mars 2014 peut être réclamé par le bailleur dans la limite de cinq ans à compter de la date de réclamation.

Au-delà du 27 mars 2017, tous les arriérés de loyer et /ou de charges nés avant le 27 mars 2014 non réclamés par le bailleur seront prescrits, c’est-à-dire irrécupérables par celui-ci auprès du locataire.

Les impayés qui viendraient à être dus après le 27 mars 2014 peuvent être réclamés pendant trois ans par le bailleur.

Enfin, cet avis de la Cour de Cassation concerne tant les contrats conclus avant l’entrée en vigueur de la loi ALUR que ceux reconduits tacitement après l’entrée en vigueur de ladite loi.


[1] Cour de Cassation, avis n°15002 du 16 février 2015, JurisData n°2015-002800

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