Maître Sophie Risaletto

La vente en viager consiste à acheter un bien immobilier moyennant le versement d’un capital/d’une somme définie à la signature de l’acte authentique appelé « le bouquet » et de régler le solde du prix via des versements mensuels appelés « rentes ».

L’engagement de verser la rente ne peut dépasser la durée de la vie du vendeur du bien immobilier ou de la personne qu’il a désignée comme bénéficiaire.

Le prix final de la vente en viager dépend donc d’un aléa pesant sur la longévité d’un individu qui peut se révéler plus ou moinslongue que ce qui avait été « imaginé » par l’acquéreur du bien. Ce dernier pourrait alors être défaillant dans ses versements mensuels et le vendeur devra alors actionner la clause résolutoire.

Dans l’arrêt du 14 septembre 2023, la Cour de Cassation rappelle que la clause résolutoire existant dans la vente en viager est d’interprétation stricte et que le bouquet doit en principe être restitué en cas de résolution même pour motifs d’impayés. (Courde Cassation, Chambre civile 3, 14 septembre 2023, n°pourvoi 22-13209)

La vente en viager s’est beaucoup développée ces dernières années au regard tant du vieillissement de la population que des prixde l’immobilier qui s’étaient « envolés » excluant toute une catégorie d’acquéreur.

À présent, confrontés à des taux d’intérêts bancaires élevés, la vente en viager pourrait également devenir attrayante pour les propriétaires qui y verrait un moyen « rapide » de vendre leurs biens immobiliers dans un marché « bloqué ». Les acheteurs pouvant quant à eux accéder à des propriétés en n’empruntant que pour le règlement du bouquet et en payant les échéances mensuelles via leurs économies par exemple.

En effet, la vente en viager peut concerner un bien libre de toute occupation du vendeur en acquérant la pleine propriété ce qui est appelé le « viager libre ». Le propriétaire peut aussi rester occupant du bien durant le temps déterminé dans la vente, en se réservant l’usufruit ou un droit d’usage et d’habitation, ce qu’on dénomme le « viager occupé ».

Quel que soit le type de viager en question, il est important de noter que l’article 1978 du Code Civil prévoit uniquement l’exécution forcée du contrat en cas de défaut de paiement de la rente.

C’est pourquoi, il est généralement inséré dans le contrat de vente en viager une clause résolutoire en cas d’impayés des échéances mensuelles par l’acquéreur.

Ces clauses résolutoires dérogeant à l’article 1978 du Code Civil sont valables.

Il convient cependant d’accorder une attention particulière à leur rédaction et à ce qui est précisé comme ne devant pas être restitué par le vendeur en cas de résolution de la vente en viager au motif de rentes impayées

par l’acquéreur.

Dans l’arrêt du 14 septembre 2023 (susvisé), la Cour de Cassation rappelle que la clause résolutoire existant dans la vente en viager est d’interprétation stricte et que le bouquet doit en principe être restitué en cas de résolution même pour motifs d’impayés.

Le vendeur n’aurait pas droit non plus aux rentes échues et impayés lorsque la clause résolutoire prévoit qu’en cas de résolution du contrat seuls les arrérages versés demeuraient acquis à ce dernier.

Il convient alors de solliciter la conservation du bouquet perçu à titre de dommages-intérêts pour résolution fautive imputable à l’acquéreur.

La non-restitution par le vendeur des frais d’enregistrement et d’acte notarié ainsi que des impôts fonciers payés par l’acquéreur doit également être sollicitée à titre de dommages-intérêts, appuyer de pièces financières justificatives, afin que la juridiction puisse y faire droit.

La résolution de la vente en viager imposant, par principe, la remise des parties en l’état antérieur, entraînant pour l’acquéreur l’obligation de restituer le bien objet de la vente et, pour le vendeur, celle de restituer l’ensemble des sommes versées au titre de cette vente [1].

Enfin, le décès de l’acquéreur du bien immobilier qui interviendrait avant celui du vendeur bénéficiant d’une rente viagère n’éteint pas l’obligation au paiement prévue dans la vente ; les héritiers de ce dernier devront alors poursuivre les règlements mensuels s’ils souhaitent conserver le bien acquis par le défunt (et ne pas subir une demande en résolution de la vente en viager pour impayés).

Votre avocat peut vous conseiller sur les actions amiables et judiciaires qui permettent de faire valoir vos droits dans le cadre des ventes immobilières tant au stade de leur signature que pour leur exécution.

Me Sophie Risaletto, E.I.,
Avocat au Barreau de Lyon, Diplômée Notaire.


Notes :

[1] Cour de Cassation, Chambre civile 2, du 13 juillet 2006, n°pourvoi 05-17.359


Article publié le 10 janvier 2024 dans Village de la Justice

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Consentement à l'utilisation de Cookies selon le RGPD avec Real Cookie Banner